Comme nous ne voulions pas la laisser seule :-), nous l’avons accompagnée avec notre fille et notre gendre, tous les cinq bridgeurs !
Nous y avons été en train de nuit et l’arrivée sur la lagune par la voie ferrée est extraordinaire, magnifiée par le dépaysement qui résulte de la prise d’un train. Autant je hais l’avion qui uniformise le temps, les distances, autant j’aime le train où j’ai déjà l’impression d’être en vacances...Surtout les trains de nuit, je rêve de prendre l’Orient express ou le Transibérien.
Rémi a toujours rêvé de faire une croisière, pour ma part j’en garde des souvenirs d’ennui avec mes parents. Alors pour une fois, nous avons été en « petite croisière » sur cet hôtel ambulant qui n’a bougé que deux fois en 5 jours. Ce qui est un moindre mal pour la lagune et l’enlisement de Venise.
Ai-je le droit de profiter ainsi de Venise, d’avoir pris des cabines de « luxe », moi qui suis de gauche et écolo ? J’essaye de me rassurer et de me dire qu’une fois en 35 ans de mariage pour faire plaisir à Elise et à ma fille et surtout à Rémi, j’ai rompu avec ma sobriété relative. Cet été, je repars en marche à pied, de refuge en refuge dans le tour du Queyras.
Et puis c’est la première fois que nous partions en vacances « de riches » disons de gens à l’aise, non parce que je suis devenue sénatrice mais parce que nous avions tant de dettes pour la cabinet, la maison et celle d’Avallon. C’est vrai que nous sommes aujourd’hui à l’aise, plus parce que nos enfants ont quitté le nid et parce que la cabinet marche bien que parcele Sénat m’a enrichi (zut, je n’ai toujours pas publié ma déclaration de patrimoine en sortie du Sénat, elle n’a pas eu le temps de variée depuis celle de janvier :-)))
Si je n’ai pas brillé au bridge au cours de la croisière, c’est à cause du mal de lagune : le bateau subissait les clapotis du passage incessant des vaporettos. Depuis le Lido, la mer Méditerranée est plus calme que la lagune. En permanence, je voyais l’horizon
que ce soit le quai
ou l’ile saint Georges, monter et descendre...
J’ai mis 4 jours pour ne plus être malade... et j’ai pu ainsi reprendre mes marques, de bridge, pour le dernier tournoi, un peu tard donc.
Mélanger bridge et visites culturelles (ah la visite du palais avec un Venissien de 75 ans, truculent est un de mes plus beaux souvenirs de visite) dans la même journée est une excellente idée.
Pour ceux qui m’accusent d’être snob parce que je joue au bridge, je peux leur confirmer que ce qui fait le snobisme n’est pas le bridge qui se joue dans tous les milieux et professions (cultivateurs, médecins, avocat, technicienne offset sur toile, métallurgiste aux mains abimées par son métier, ouvrière pantolonnière... sont autant de métiers qui prédisposent au bridge) il est évident que le revenu et donc les lieux d’habitation ou de vacances est la seule cause de snobisme de ce jeu d’esprit : la ségrégation spatiale de la France est forte et donc la ségrégation des loisirs est plus la cause du snobisme que le jeu lui même.
Ainsi dans certains club il est interdit d’être en short ou dos nu (comme au Sénat)... mais dans d’autres, le club rembourse les prix des ingrédients des plats apportés pour les repas conviviaux, tant certains se sentent mal à l’aise car ne pouvant acheter des ingrédients de qualité. Nous jouons dans plein de clubs, en vacances ou en région parisienne, et le snobisme est rarement présent.
Dans cette croisière, le niveau socioculturel était bien sûr plus élevé que dans nos clubs respectifs, mais le léger snobisme de certains était très supportable et en tout cas plus que le mépris des « bons joueurs » pour les petits indices que nous sommes (Elise est la « plus gradée » de nous cinq)
Donc une bonne ambiance dans notre groupe et j’ai eu envie d’inviter les participants à visiter le Sénat.
Une dizaine ont répondu à l’appel (90% de femmes) ! Et j’ai eu le plaisir de retrouver la compagne de perdition de ma belle-mère : elles avaient perdu le groupe dans le ghetto de Padoue !
Heureusement un petite prière à Saint Antoire, et elles ont été retrouvées :-)
Cette visite du Sénat fut pour moi l’occasion de comparer la procédure d’élaboration de la loi et celle d’un« contrat » bridgesque...car l’un comme l’autre sont un travail sur la langue : les annonces au bridge décrivent le jeu en nombre de carte dans les couleurs (trèfle, carreau, cœur, pique) mais aussi en présence d’honneurs, as, roi, dame, valet.
En comme il y avait séance après, certaines sont restées pour assister à la cérémonie où les gardes républicains rendent honneur au Législateur, avant chaque séance.
J’espère avoir répondu à la question qui m’était posée dans le bateau : « quel intérêt avez-vous à organiser cette visite ? »
Aucun si ce n’est
- qu’à faire découvrir un lieu où l’histoire ME regarde et où j’ai essayé pendant 22 mois de faire une belle et bonne loi, comme mes collègues même si je ne suis pas d’accord avec eux, pour que la France reste digne de son histoire.
- et à faire comprendre que les politiques, nous ne sommes pas tous des pourris, coupés de la réalité de la vie sociale... même si c’est dur à expliquer :-)