Comme tout le monde le sait, je n’ai jamais été coquette et ma mère prétend même que si je suis devenue avocate c’est pour pouvoir cacher mes habits sous ma « biaude » (terme morvandiau pour désigner la blouse des maquignons).
J’ai donc fait le tri dans ma garde-robe et j’ai jeté t-shirts tachés, chemisiers trop petits, jupes parfois vieilles de plus de 20 ans... Plus exactement, je les ai mis de côté pour les donner à Emmaus.
La pauvreté de ma garde-robe fait peur, j’ai donc essayé de trouver un magasin pour acheter jupes, t-shirts et autres. Depuis quelques années les habits que j’achetais l’étaient auprès d’Azimut (ONG travaillant avec le Tibet avec des matériaux bios et en respectant les valeurs du commerce équitable).
Azimut ayant, hélas, été lâché par son banquier, je me trouvais fort dépourvue pour porter des habits correspondant à mes valeurs politiques.
Heureusement Céline est fondatrice de Rurban coop et donc très au courant du tissu écologique artisanal seine-et-marnais. Elle m’a proposé d’aller rencontrer une couturière au nord du département. Stéphanie venait de créer son atelier de couture, j’y suis donc allée avec de magnifiques lainages que mon père avait achetés quelques mois avant sa mort. Stéphanie m’a donc inventé des jupes pour mettre en valeur à la fois mes formes qui n’en avaient pas besoin et aussi, mais surtout, la qualité de ces lainages.
Discutant de la difficulté à trouver des vêtements bios, elle m’a révélé qu’une jeune entreprise seine-et-marnaise installée à Logne venait de se créer, avec, pour but, de commercialiser en France des tissus bios en coton. Sa dirigeante suit du lieu de culture jusqu’en France, les fait tisser en France parfois sur des vieux métiers mis au rancard, et teindre avec des couleurs végétales. Mais, surtout, elle crée elle-même ses motifs et c’est ainsi que sur Internet je découvris la collection d’Amandine.
Évidemment, ma passion des champignons et d’Alice au pays des merveilles (le seul livre que j’ai lu en anglais après l’avoir connu par cœur en français) me fit acheter ce magnifique tissu.
Après trois essayages, nous arrivâmes à trouver avec Stéphanie un modèle de jupe où les couleurs, et surtout la ceinture, étaient adaptées à la solennité du Sénat, malgré le caractère fantaisiste du tissu.
N’ayant pas le temps d’imaginer un haut, je me suis rabattue sur un T-shirt en coton bio d’une marque de vêtements de sport très connue. Et c’est ainsi que je pus aller au Sénat toute de coton bio vêtue.
Cet épisode, valorisant pour la filière bio seine-et-marnaise, illustre les codes pesants qui régissent la vie au Sénat : collaborateurs et sénateurs, collaboratrices et sénatrices (plus encore les collaborateurs que les sénateurs) doivent s’habiller conformément aux codes.
Les appariteurs et autres personnels du Sénat, sans jamais se départir de leur politesse exquise, nous font bien comprendre la nécessité de respecter les codes vestimentaires du Sénat. Il est certainement plus facile pour les femmes de le faire que pour les hommes qui doivent à tout prix porter une cravate.
Et c’est pourquoi vous verrez, lorsque je publierais, comme j’ai toujours dit que je le ferai, annuellement, l’utilisation de mon indemnité représentative de frais de mandat, une grosse part sera attribuée à l’achat de vêtements.
Non parce que ma coquetterie freinée depuis 50 ans reprenne le dessus, mais tout simplement parce que, élue de la République je me dois de respecter le décorum de celle-ci et l’honneur que m’ont fait les électrices et électeurs.
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