A la sortie de l’audience, les journalistes se sont précipités sur moi pour avoir mes impressions : et la première fut de dénoncer l’absurdité de la solution proposée par le Commissaire du Gouvernement.
Monsieur PAPON [1] a des droits que n’ont pas les victimes.
Le bourreau, le seul haut fonctionnaire, condamné pour complicité de crime contre l’Humanité, a pu demander à l’Etat de prendre en charge la faute de service qu’était sa complicité dans le crime contre l’Humanité commis 60 ans auparavant. Fonctionnaire sous Vichy, il a, à la fois participé en tant que fonctionnaire à une faute de service et dont l’Etat, 60 ans après doit réparation et a été complice, à titre personnel, de crime contre l’Humanité.
Et cette demande a été admise comme légitime par le Conseil d’Etat sans que soit opposé à monsieur Papon la prescription de son action. 60 ans après l’Etat est partiellement responsable de son fonctionnaire. Et l’arrêt Papon a été pris sans aucune limitation de durée. Le Conseil d’Etat en condamnant l’Etat à participer au remboursement des indemnités n’a nullement visé comme fait générateur de la responsabilité de l’Etat l’arrêt pénal, contrairement à la demande de son commissaire du Gouvernement : « Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la faute de service analysée ci-dessus engage, contrairement à ce que soutient le ministre de l’intérieur, la responsabilité de l’Etat ; »
Si l’Etat doit couvrir son fonctionnaire, c’est parce qu’il, l’Etat, est responsable des fautes de service commises en 1940-1944 et non parce que la Cour d’assises a décidé d’appliquer l’imprescriptibilité des crimes contre l’Humanité.
Si on suit le commissaire du Gouvernement, la SNCF, personne morale de droit public, ne serait pas responsable, même partiellement des fautes de service commises pendant la dite période. Mais si Papa avait connu le chef de gare qui a sifflé le départ du train sans s’assurer que les conditions minimales du service public, notamment la qualité, n’étaient pas présence (pas de WC, pas d’eau, pas de siège), si Papa avait donc fait condamner le dit chef de gare, alors, la SNCF aurait dû, en application directe de l’arrêt Papon, prendre en charge l’indemnisation. Mais parce que sans doute celui-ci fut fusillé dés la libération de Toulouse, Papa est privé d’indemnisation.
Ainsi, par un manque de réflexion flagrante ou parce qu’il sait déjà qu’il ne sera pas suivi, le commissaire du Gouvernement a, une nouvelle fois dans l’histoire de France et du monde, rappelé qu’il fallait mieux être bourreau que victime...
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