L’affaire LIPIETZ rebondit :

une demande d’avis au Conseil d’Etat audiencée le 6 février 2009

mercredi 4 février 2009, par Hélène Lipietz

Allez, reprendre le chemin du clavier et à nouveau écrire, écrire encore, écrire toujours pour que rien ne s’efface, pour que les morts soient honorés et les vivants reconnus.

Une grande fatigue

C’est vrai que je n’ai plus beaucoup écrit sur ce site, ni politiquement, ni sur l’affaire LIPIETZ »¦

Parce que depuis 2 ans et l’application de la volonté sarkozienne sur les étrangers, je ne sais plus où donner de la tête ! Mais aussi parce que je suis un peu saturée de cette histoire qui n’est pas la mienne comme je l’ai toujours écrit.

Porter un dossier juridique est toujours lourd, j’en sais quelque chose, moi qui ai été l’avocate de dizaine d’enfants violés, de parents d’enfant assassiné ou de pédophiles. Pour s’en sortir il faut pouvoir être la caisse de résonance du client, mais n’être que cela, ne pas en déformer le rythme.

Dans le procès de Papa, Guy et Papi et Mamie c’est Rémi la caisse de résonance, et je suis l’ayant droit de la victime, victime moi-même du complexe du survivant »¦ Alors oui, j’ai eu envie d’abandonner, pas le procès, mais les commentaires sur le procès.

Je n’ai ainsi pas commenté l’arrêt de section sur l’incompétence de la juridiction administrative dans la responsabilité de la SNCF. Il est vrai que les conclusions n’avaient pas été foudroyantes, reprenant l’arrêt de Bordeaux »¦

Il est trop tard maintenant pour commenter cet arrêt insipide, Rémi l’a fait, vous pouvez aller le lire. Mon cher et tendre a aussi fait un commentaire indirect de cet arrêt en le comparant à l’arrêt qui affirme la compétence du juge administratif dans la décision de la société centrale canine de refuser les inscriptions à des chiens aux oreilles coupés »¦ Bref, les juifs, les homosexuels, les résistants, les tziganes moins biens traités que des animaux dans leur transports vers les camps de la Mort ou de travail auraient pour juge naturel le juge civil et les chiens, le juge administratif, allez donc comprendre et enseigner cela aux futurs juristes !

Sauf que »¦Sauf si »¦ le Conseil d’Etat voulait que chaque ordre de juridiction prenne sa part dans le traitement de l’après-guerre.

Un autre procès devant le Conseil d’Etat

Car tout n’est pas fini, outre le procès que ma mère et mon oncle envisagent toujours de recommencer devant le TGI de PARIS, contre la SNCF, reste à juger par les tribunaux administratifs des demandes de tous ceux qui ont vu dans le Procès de Toulouse, enfin la rémission des fautes commises pendant l’occupation [1].

En effet, faut-il rappeler que Papa a gagné contre l’Etat français et que celui-ci n’a pas fait appel ? Le procès LIPIETZ , ce n’est pas que le procès contre la SNCF, c’est le procès contre un système de pensée qui a nié l’Humanité.

C’est ainsi que près d’un millier de demandeurs sont encore en attente de leur demande d’indemnisation. Rémi et moi-même, comme avocats, avons refusé de prendre ces dossiers, parce que Rémi n’a été l’avocat que de son beau-père, il a ainsi payé sa dot pour m’avoir comme femme »¦ Et puis nous ne voulions pas que certains disent que Rémi avait fait cela pour se faire un nom (qu’il avait déjà en droit public) ou pire encore se faire de l’argent »¦ la polémique a ainsi tourné court même si certains s’y sont essayés.

D’autres avocats ont accepté les dossiers et un réseau informel d’avocats s’est ainsi constitué, Rémi leur apportant ses connaissances du dossier.

une demande d’avis au conseil d’Etat

C’est ainsi qu’une cliente d’Anne-Laure ARCHAMBAULT, madame H-G, fille de déporté et enfant cachée, a l’honneur aujourd’hui de donner son nom à l’avis qui va être évoqué par le Conseil d’Etat le vendredi 6 février, je ne sais si, comme Guy, elle refusera que son nom apparaisse.

La procédure d’avis est prévue par le code de justice administrative quand un tribunal administratif estime qu’une affaire pose une nouveau problème juridique sérieux et qui risque de se répéter. Pour éviter des divergences de jugement selon les tribunaux, le premier tribunal saisi peut demander un avis au conseil d’Etat. En l’occurrence le Conseil d’Etat doit se prononcer sur cinq questions :

  1. Les demandes indemnitaires contre l’Etat sont-elles imprescriptibles ?
  2. si elles sont prescriptibles, quel est le point de départ de la prescription ?
  3. quels sont les préjudices indemnisables ?
  4. les préjudices ont-ils déjà été indemnisés par les différentes prestations versées tant par l’Etat allemand qu’au titre des orphelins ?
  5. enfin l’opportunité d’une indemnisation symbolique

un gigantesque travail en commun

J’aimerai pourvoir mettre en ligne les mémoires de l’avocat aux Conseils qui défend madame H-Get qui va plaider vendredi. Maître Nicolas BOULLEZ est un avocat aux Conseils, j’ai explique leur rôle dans un autre article.

Il faut partie de la longue liste des avocats qui auront permis, du moins je l’espère, aux victimes de l’Etat français d’être enfin entendues, après que le Conseil d’Etat dans l’arrêt GANASCA est fermé pour 60 ans tout espoir d’indemnisation :

  1. Maitre GARAUD et la SCP LYON-CAEN, Avocats dans l’affaire Pelletier qui a permis à Rémi d’entrevoir, le premier de tous, et longtemps le seul, que les victimes de l’Etat français pouvaient demander réparation selon la procédure de droit commun.
  2. Maitre Boulanger, avocat des victimes de Papon qui a obtenu la prise en charge des sommes mises à la charge de Papon par la Cour d’assises par l’Etat français .
  3. Maître Monod, notre avocat aux conseils, même si nous avons perdu qui a su synthétiser et amplifier 6 ans de réflexions
  4. Maitres Biton, Archambault,Casadei, Hershkovitch, Valadou, Polubocsko, Luciani, Candon, Zermati, Weisz »¦ et tous les autres, de tous les barreaux de France que j’oublie ici mais qui ont porté les dossiers et les peines si longtemps cachées des survivants. Je sais que certains ont dû prendre des anxiolitiques ou outres calmants car la Shoah détruit tout sur son passage. Rémi pourtant leur a toujours conseillé de ne jamais travailler sur de tels dossiers l’après-midi !

Alors que le Barreau français n’a pas beaucoup lutté contre les lois scélérates de Vichy, je vous conseille la magnifique BD «  l’ordre de Cicéron », aujourd’hui tous ces avocats sont l’honneur de la profession, oeuvrant souvent à l’aide juridictionnelle ou à des tarifs dérisoire pour porter, après Remi, les souffrances des déportés, Juifs, résistants, tziganes, homosexuels et celles des survivants.

Notes

[1ma mère m’a toujours enseigné que le Sacré-Cœur avait été bâti « en rémission des fautes commises pendant la Commune »

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