Madame la ministre de la Justice, Garde des Sceaux [1],
Je dénonce haut et fort l’ouverture prochaine des audiences du Juge de la liberté et de la détention dans des annexes des Palais de Justice, sises à Mesnil-Amelot et Roissy.
Les premières audiences sont programmées le 30 Septembre prochain, vous pouvez encore arrêter cette parodie de Justice.
Hier, comme hélas aujourd’hui, avec les associations de défense [2] non seulement des étrangers, mais aussi des citoyens, avec des élus et des avocats, j’ai manifesté devant le centre de rétention administrative (CRA) du Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne) afin de refuser la mise en service de ce coûteux projet porté par les précédents gouvernements.
Bien sûr, il faut appliquer les lois de la République et donc rendre la Justice. Mais elle doit continuer à être rendue dans des lieux communs à tous les justiciables. Il faut préserver la publicité effective des audiences rendues au nom du peuple français devant le peuple français.
Les annexes des palais de Justice ne présentent pas les conditions de Justice garantissant la dignité universelle à la-quelle la justice et les justiciables ont droit, qu’elles soient situées auprès du centre de rétention administrative (CRA) ou dans la zone d’attente pour personnes en instance (ZAPI) de Roissy, où seule une armoire métallique établit la frontière entre le lieu privatif de liberté et la salle d’attente de l’audience.
Il y a trois ans, j’avais déjà manifesté au CRA du Mesnil-Amelot contre la décision de création d’une annexe du tribu-nal portée par un gouvernement de droite xénophobe. J’ai manifesté hier, les larmes aux yeux, contre la décision d’ouverture du gouvernement de gauche perdant ainsi toutes ses valeurs.
Rien ne peut justifier une telle entorse aux principes pour lesquels le peuple français s’est levé en 1789. Rien ne justifie la création de tribunaux d’exception : ni une prétendue rationalité de coûts budgétaires, qu’aucun chiffre ne permet de confirmer [3], ni une prétendue humanisation de conditions des retenus qui n’auraient ainsi pas à être conduits en car dans les palais de Justice. C’est ignorer l’égalité de jugement nécessaire à une Justice crédible, il n’y a pas de justiciables qui méritent un palais et d’autres, une simple annexe.
Je souhaite vivement pouvoir vous rencontrer avec certaines associations de défense des droits humains »“ le cas échéant, en vous accompagnant pour une visite de ces locaux - afin de vous convaincre que le gouvernement s’honorerait de renoncer à mettre en œuvre des dispositions susceptibles de dégrader durablement les Droits du Citoyen-ne.
La Justice rendue au nom du peuple français doit être rendue dans un palais au sein de la cité et non dans une annexe au bout d’une piste d’aéroport.
Écologiquement et citoyennement vôtre,
Hélène Lipietz, membre de la commission des lois