Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les habitants de notre beau pays ont eu de nombreux noms : Celtes, Gaulois, Gallo-romains, Mérovingiens, sujets puis administrés...
Pourtant, les Français aujourd’hui se rêvent citoyens-citoyennes entendus d’une administration perçue comme lointaine. Je ne dirai bien évidemment pas que l’administration soit sans problème, la Cour des comptes vient de nous le rappeler. La simplification des formalités administratives est incontestablement une nécessité. Les méandres de l’accès à certaines informations, de la préparation de dossiers, de leur dépôt, des recours sont des freins objectifs aux droits des citoyennes et des citoyens.
Par ailleurs, la large diffusion de l’accès à internet est une chance à saisir. Mais internet ne peut pas tout, car la vie sociétale, c’est d’abord des liens entre individus et non avec une machine.
La décision de simplifier les relations entre l’administration et les citoyens ne peut donc qu’être encouragée et l’idée de les codifier est bienvenue. Reste que ce texte, s’il a pour but écrit de renforcer le dialogue entre l’administration et les citoyens, ne renforce pas le dialogue entre le Gouvernement et les parlementaires, et c’est là son plus grand défaut.
Premièrement, ce projet de loi présente les parlementaires comme des êtres frustes, incapables de comprendre la complexité de l’administration, voire des thèmes techniques, qui seront abordés dans les ordonnances.
Bref, « restons entre fonctionnaires pour arranger nos rapports avec les citoyens », sans laisser à leurs représentants le droit »“ c’est le cas de le dire ! »“ d’y mettre leur grain de sel...
Le Gouvernement pense-t-il que les parlementaires, les associations, les citoyens qui les épaulent ne sont pas capables d’effectuer des analyses techniques et que seuls les fonctionnaires des ministères le sont ? Je crois bien que non mais sans doute ai-je vraiment très mauvais esprit »¦
Le second motif est que les ordonnances protégeraient d’un encombrement excessif le travail parlementaire.
Effectivement, en matière d’encombrement excessif ou non, le Gouvernement est un expert. Nous avons déjà eu tout notre soûl de projets de lois, et peu de temps pour réfléchir et préparer nos amendements.
Nous avons su faire face, mais combien de nos réunions ont été inutiles puisque les textes n’avaient pas été discutés en amont ?
L’amendement surprise du Gouvernement qui nous est arrivé ce matin en est l’exemple flagrant. Cet amendement modifie une loi dans le projet de loi même qui autorise le Gouvernement à la codifier. Long de deux pages, il fait droit au dicton « qui ne dit mot consent ». Mais cet amendement complexe, modifiant la loi et non la codifiant, mérite plus qu’une seule lecture en séance, le jour même de sa discussion dans l’hémicycle.
C’est pourquoi, rien que pour la forme, évoquée ici, les écologistes ne pourront le voter ; pour ce qui est du fond, je reprendrai la parole plus tard.
Ainsi, vouloir nous faire croire que c’est pour notre bien que le Gouvernement passe par-dessus nos votes ne laisse rien présager de bon concernant la ratification de ces ordonnances. Car si nous n’avons pas le temps aujourd’hui de discuter de ces mesures, aurons-nous plus de temps pour analyser lesdites mesures lorsqu’elles reviendront devant nous pour approbation ? Il faut en particulier souligner que cette codification n’est pas à droit constant mais à droit innovant. Faudra-t-il alors avoir une confiance aveugle dans les techniciens qui ont rédigé ces mesures ? N’avons-nous rien appris des ratés techniques, a minima coûteux, prônés par des techniciens sans légitimité démocratique qui sauraient mieux que nous ce qui est bon pour tous ?
Ainsi, le nucléaire »“ je pense en particulier au surgénérateur, grâce auquel on nous promettait la lune énergétique et qui se révèle un puits financier sans fond »“ présente des risques sanitaires et économiques infinis.
Les organismes génétiquement modifiés, qui devaient nourrir la planète, apportent la pauvreté à des agriculteurs qui se retrouvent pieds et poings liés. Aux États-Unis, l’emploi des OGM a d’ailleurs permis de vérifier en moins de neuf ans l’adaptabilité du vivant, pied de nez à la brevetabilité de celui-ci !
L’informatisation de la sécurité sociale par la carte Vitale, coûteuse et qui n’est toujours pas au point, n’a pas permis d’atteindre les objectifs d’éradication de la fraude, de réduction des déficits et représente une violation manifeste du secret professionnel médical.
Le vote électronique, qui pose des problèmes de sécurité et de véracité du vote, n’a pas permis de réduire les coûts ni de diminuer l’abstention, objectifs pourtant mis en avant lors des premiers déploiements.
Permettez-moi, madame la ministre, de douter que votre administration, notre administration, sache mieux que nous, élus, qui n’avons pas su prendre la mesure des attentes citoyennes quant à la transparence de notre patrimoine, organiser sa propre transparence. Mais, encore une fois, je suis vraiment mauvaise langue.