2 ème lecture et fin de navette

Renforcer la lutte contre la contrefaçon

c’est la lutte ... ;-)

jeudi 27 février 2014, par Hélène Lipietz, Aurélien Vernet

La proposition de loi de notre collègue Richard Yung revenait ce mercredi 26 février en séance avec la volonté affichée d’effectuer un vote conforme avec celui de l’assemblée afin de mettre un terme à la navette parlementaire.

Si vous avez suivi le premier épisode, vous comprendrez ma méfiance vis-à -vis de ce texte et des pressions qu’il peut engendrer.

Voir en ligne : Le dossier législatif

Monsieur ou madame la présidente, Monsieur le rapporteur, ( Delebarre ) Madame la ministre ( Nicole Bricq ) Mes chers collègues,

Ce texte contrefaçon nous revient de l’assemblée nationale, et j’ai cru comprendre que notre rapporteur et madame la ministre espéraient un vote conforme.

Je vais tout de suite vous rassurer : les écologistes auront l’immense plaisir de participer au terme de la navette en votant ce texte.

En effet, pour une fois, j’ai évité de noyer notre commission des lois sous mes nombreux amendements et je sais que le rapporteur et un certain nombre de nos collègues en sont soulagés

(et aussi, il faut bien l’avouer, mes collaborateurs)

Toutefois je vous proposerai deux amendements d’appel afin de susciter les réflexions de notre sage assemblée.

Ce texte vise à renforcer les moyens des douanes en leur apportant des facilités et de nouveaux outils juridiques afin de lutter plus efficacement contre la contrefaçon.

Je suis évidemment attaché comme nous tous, à la sécurité des consommateurs, sécurité qui est souvent mise en danger lorsqu’il s’agit de produits contrefaits dont le respect des normes de sécurité est souvent douteux.

Nous sommes attachés également à la préservation de l’industrie française, dont la qualité des productions est reconnue dans le monde entier, ce qui a tendance à attiser les appétits des contrefacteurs.

C’est pourquoi les écologistes ont voté pour cette proposition de loi en première lecture, après avoir obtenu la promesse de la part de notre ministre, que ces nouvelles procédures ne seraient pas utilisés contre les agriculteurs.

 Cette loi, je le rappelle, ne s’intéresse pas directement à la définition de la contrefaçon ce qui est sans doute un tort, mais dans le cadre d’une proposition de loi cela eut sans doute été fort difficile.

Toutefois elle a ravivé les débats déjà anciens concernant l’appropriation du vivant par des entreprises privés.

Le débat n’est pas clos et il aura lieu lors de l’examen du Projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, le débat à l’assemblée ayant déjà permis des avancées.

Il faudra donc, un jour que nous approfondissions les questions de propriété intellectuelle. Ce n’est pas, à mon avis, le rôle de la seule commission des lois.

Il me semble que la commission culture s’occupe déjà  depuis longtemps des questions de droits d’auteur et des droits attachés aux œuvres culturelles afin de protéger la création tout en permettant un accès le plus large possible pour tous les publics à la culture.

Je pense que notre commission économie devrait s’intéresser à l’évaluation économique des droits de propriété intellectuelle.

Si la plupart des économistes s’accordent sur le fait qu’une protection de l’innovation est nécessaire pour préserver les investissements privés dans la recherche et développement, il ne faut pas occulter les enjeux actuels autour des nouvelles technologies.

Les droits de propriété intellectuels et les brevets deviennent des enjeux spéculatifs pour les grandes entreprises.

Elles cherchent à acquérir des portefeuilles extrêmement fournis de brevets afin d’entraver leurs concurrents sous des procès interminables aux enjeux financiers colossaux

J’en veux pour preuve la guerre ouverte que se livrent les deux géants des smartphones depuis 3 ans : l’américain Apple et le coréen Samsung. Les enjeux financiers s’élèvent à plusieurs milliards de dollars.

On en arrive donc à une situation paradoxale où la protection devient une entrave à l’innovation.

Je veux évoquer enfin ou plutôt évoquer de nouveau un problème plus grave encore, qui est celui des médicaments.

Les sociétés pharmaceutiques maximisent leurs profits et empêchent l’accès à un grand nombre de médicaments aux plus démunis à travers le monde, alors même que la recherche médicale est financée en grande partie par les États, notamment à travers l’éducation des futurs chercheurs voire en France par la sécurité sociale à travers l’autorisation de mise sur le marché de nouvelles molécules au service médical rendu insuffisant ou insuffisamment précisé !

Encore une fois, dans cette hémicycle les écologistes appellent à une réflexion sur notre modèle de développement culturel ou industriel »¦

nous sommes rejoints dans notre étude par le prix Nobel 2001 d’économie américain Joseph Stiglitz, que le président SARKOZY, dans sa grande sagesse, avait mandaté pour réfléchir à la rénovation des indicateurs de la croissance !

 »œLe remplacement du modèle actuel par un système de récompense soutenu par l’État constituerait une solution à la fois au niveau élevé des prix et à la mauvaise orientation des recherches.

Je vous remercie.

Ci-dessous, les défenses des deux amendements d’appel que j’ai défendu.

Défense de l’amendement semences et animaux :

La loi contrefaçon que nous examinons aujourd’hui avait cristallisée les inquiétudes des réseaux semences paysannes et de la confédération paysanne.

Nos ministres ont tenu parole, et les débats concernant la loi de programmation agricole ont permis de renforcer la protection des agriculteurs utilisant les semences fermières.

Nous les avions soutenu en proposant avec mon collègue Joël Labbé, des amendements visant à rappeler et renforcer la protection des semences de fermes et la reproduction du vivant en général sur une exploitation. Le gouvernement à tenter calmer les inquiétudes. Et c’est important de le souligner. Notre rapporteur souligne la faible portée juridique de ces disposition et je le rejoint.

Explication de vote de l’amendement suspension de brevet pour motif d’intérêt général :

Cet amendement vise à ce que notre assemblé et nos ministres envisagent des modes d’assouplissement ou de réforme du système stricte de la propriété intellectuelle lorsque l’intérêt général est en jeu. Il propose de donner la possibilité au ministre en charge de la propriété intellectuelle de suspendre temporairement l’exercice d’un droit de propriété intellectuelle lorsque l’intérêt général est en jeu.

J’ai cité tout à l’heure Joseph Stiglitz sur une réforme possible du système des brevets sur les médicaments :

Au travers d’un système de récompense, les innovateurs se verraient rétribués pour leurs nouvelles avancées, mais ne conserveraient aucun monopole pour l’exploitation de celles-ci.

De cette manière, la puissance des marchés compétitifs permettrait qu’une fois un médicament développé, il soit disponible au prix le plus bas possible »“ et non à un tarif gonflé par le monopole. »œ

Forum