Ma déclaration

pour le texte sur l’évolution du mariage

mardi 16 avril 2013, par Hélène Lipietz

Avant de voter cette loi,

je pense aux opposants à l’ouverture du mariage et de l’adoption aux personnes de même sexe, avec qui je converse depuis deux mois par internet.

Pour eux l’évolution de la famille est un véritable bouleversement et j’en suis consciente.

Mais à quelles familles pensent-ils, à quelles familles rêvent-ils ?

Celles des temps anciens

1 ° où le fils de famille engrossait la bonne après le père qui la renvoyait quant les œuvres de la nature étaient visibles ?

2 ° où celles des parents adoptifs qui cachaient, cachent, à leurs enfants la réalité biologique de leurs origines ?

Or la famille n’est plus la même

le divorce est banalisé
la tutelle du mari sur la femme est obsolète,
la puissance paternelle est morte,
IVG est hélas encore trop un mode de contraception,
l’égalité dans toutes les filiations est devenue la règle,
et les familles recomposées sont très présentes.

Oui ce texte c’est un évolution, pas une révolution de la norme républicaine

mais pas de la société

Car aujourd’hui notre société est prête à l’indifférence.

En pensant aux opposants, je suis sure que demain leurs enfants joueront avec les enfants d’homo, comme les enfants de divorcés ou de filles-mères jouent aujourd’hui avec eux, lorsque j’étais à l’école, ce n’était pas le cas.

Je pense aux homo femmes et hommes, et notamment à ce gay qui a été massacré au nom d’un norme morale

et surtout à leurs enfants quel que soit le mode de leur conception, qui n’auront plus de crainte quant à leur avenir familial,

qui peuvent dire, se dire, que leurs parents sont dans la norme, donc normaux,

que leurs parents sont dans leur devoir et leur droit de parent.

Enfin, je pense aux hétéros présents dans cet hémicycle qui font ce geste républicain de fraternité.

Le prononcé réèl acté au compte-rendu intégral permet de lire les exclamations des autres parlementaires, ce que l’on a pas la chance d’entendre dans la vidéo !

M. le président. La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, madame la ministre, mes chers collègues, avant de voter en faveur de ce texte, je pense à ceux qui s’y opposent, avec qui je corresponds depuis plus d’un mois, notamment par le biais d’Internet. à€ leurs yeux, l’évolution de la famille est un véritable bouleversement, une remise en cause profonde de ce à quoi ils croient.

Mais à quelle famille pensent-ils ? De quelle famille rêvent-ils ? Celle des temps anciens, où le fils de famille engrossait la bonne après le père, qui la renvoyait lorsque les œuvres de la nature étaient visibles ? (Oh ! sur les travées de l’UMP.) Ou celle des parents adoptifs qui cachent ou cachaient aux enfants leur réalité biologique ? La famille n’est plus cela ! Depuis le divorce, la fin de la tutelle du mari sur la femme et de la puissance paternelle, l’IVG et l’égalité de toutes les filiations, les familles recomposées ont bouleversé la famille, les familles. Oui, ce texte introduit une évolution de la norme républicaine, mais il ne révolutionne pas la société.

Aujourd’hui, en effet, notre société est prête à l’indifférence. Je suis sûre que, demain, les enfants des opposants à ce texte joueront avec les enfants d’homos, »¦

Mme Michelle Meunier, rapporteur pour avis. C’est déjà le cas !

Mme Hélène Lipietz. »¦ tout comme les enfants de divorcés ou de filles mères jouent aujourd’hui avec eux, alors qu’il n’y a pas si longtemps, à l’époque où j’étais moi-même à l’école primaire, on ne devait pas jouer avec les enfants de divorcés. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)

Eh oui, mes chers collègues !

Mme Bariza Khiari. Elle a raison !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. C’est vrai !

M. Christian Cambon. Dans quelle école étiez-vous ? Une école de riches ?

Mme Hélène Lipietz. Je pense aussi aux homosexuels, qu’ils soient femmes ou hommes, et tout particulièrement à cet homosexuel massacré il y a cinq jours. Je pense surtout à leurs enfants, qui n’auront plus à redouter leur avenir familial et qui pourront dire ou se dire que leurs parents sont dans la norme, parce que dans le droit, qu’ils sont « normaux », eu égard à leurs devoirs et leurs droits de parents.

Enfin, je pense aux hétérosexuels, qui font aujourd’hui, dans cet hémicycle, ce geste républicain de fraternité. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)

Voyage à deux, Anafi, Grèce

J’ai prononcé mon explication de vote sur le mariage, ce qui a déclenché une réaction sympathique sur Tweeter ! Je n’ai pas de compte sur ce site, mais un attaché de notre étage nous l’a gentiment signalé ! Merci @AFontaineHsu

Moi je me verrai bien en Mc Gonagall, enfin s’il fallait en choisir une ! En plus, spécialiste en Métamorphoses, je pourrai changer les antis en pros.

Explication de vote mariage pour tous

Le mariage sur le site des écolos du Sénat

P.-S.

La presse a fait part de la colère de nombre de partisans du mariage pour tous à la suite du vote à main levée par le Sénat de la loi. Il faut savoir que dans le règlement du Sénat le vote solennel (c’est à dire par bulletin) n’est pas obligatoire, il faut donc qu’il soit demandé par le président d’un groupe.

Or, durant toutes les explications du vote final, la droite s’est gaussée du fait que le parti socialiste a régulièrement fait appel à cette procédure de vote car la gauche était minoritaire en séance.

Lors du vote final Jean-Pierre Bel, qui présidait la séance, a regardé les rangs et a constaté, comme l’avait fait M. Rebsamen, président du groupe socaliste, que les partisans du mariage pour tous étaient plus nombreux dans l’hémicycle que les opposants.

Il était évident que le groupe socialiste n’allait pas faire ce plaisir à la droite de demander un vote solennel alors même qu’ils étaient majoritaires, c’est pourquoi, après avoir vérifié que ni la présidente de l’UMP ni le président du groupe socialiste ou d’aucun autre groupe ne demandait un tel vote, le président du Sénat a mis au vote et le vote s’est fait à main levée.

Toutefois après ce vote, les présidents des différents groupes ont demandé que soient publiées en fin du compte rendu du Sénat les intentions de vote des sénateur-rices sur l’ensemble du projet de loi ouvrant le mariage pour les couples de personnes de même sexe, ce qui a été fait.

Forum

5 Messages

  • En intégrant la vidéo d’Hélène sur Internet, je me suis retrouvé nez à nez avec la proposition vidéo suivante :

    Les anti-mariage se sont amusés à créer ce type de vidéo pour chaque sénateur favorable au mariage pour tous. En cherchant un peu je suis tombé sur leur site, et sur les indications d’Hélène je leur ai envoyé un petit mail ! Il n’y a pas de raison que ce soit toujours les même qui s’amusent ! :-)

    Bonjour,

    je constate une erreur sur votre site, sur la fiche suivante correspondant à Hélène Lipietz :

    http://www.senateurpourtous.com/?idSenateur=233

    Il est indiqué que sa réélection dépend des élus locaux,

    toutefois, Hélène Lipietz ne souhaitant pas se représenter, sa non-réélection ne dépend que d’elle-même.

    Merci par avance pour vos corrections

    Écologiquement.

  • Très beau discours. Merci.

    Juste un détail me gêne. « IVG est hélas encore trop un mode de contraception » C’est pas dans son discours d’origine en plus, pourquoi avoir rajouté ce genre de « précision » à l’écrit ? Venant d’un texte de EELV, ça me choque. On est plus loin de « l’IVG de confort ». Je veux dire, cette petite phrase vise (de manière consciente ou non) à pointer du doigt un peu plus les femmes qui avortent. Comme si elles ne l’étaient pas assez. Comme si c’était une honte. C’est ça qu’on veut ? Autoriser les femmes à avorter, mais qu’elles en aient honte ? C’est ça la liberté des femmes ? Zut, hein.

    • Bonjour et merci de votre lecture attentive :-)

      Mais si, mais si, le texte d’origine est celui que j’ai publié... mais quand je parle, j’essaye de ne pas trop lire mon texte pour être plus vivante, d’où les différences.

      Pour moi, ce qui me choque c’est qu’aujourd’hui il y ai encore autant d’IVG, ce qui prouve que la contraception n’a pas été là : jeunes filles ayant peur de leurs parents ou de demander au mec de mettre une capote et de toute façon « la première fois cela ne peut pas marcher ».

      je ne pense pas qu’un avortement, même par pilule, soit jamais de confort... c’est toujours un cas de conscience pour la femme... et pour son homme, ne pas les oublier ceux-là 

      mais je pense que lors des 3 minutes que j’avais pour dire mon opinion, avec la pression de l’émotion, j’ai dû avoir peur de manquer de temps d’expliquer ce scandale français qu’est l’absence d’éducation efficace à la limitation de la procréation et que, du coup, j’ai censuré cette phrase... mais je l’ai laissée dans le texte de mon ordi... en me disant que j’aurai bien le temps un jour de reprendre mon idée...

      vous avez été plus vite que moi :))

      en espérant que vous ayez mieux ainsi compris cette phrase... qui était aussi pour rappeler aux anti-mariage homo que la famille était parfois une cause de souffrance...

      • Bonjour Madame,

        Je suis tombé, au gré de mes errements sur les réseaux sociaux, sur votre intervention concernant le mariage pour tous, que j’ai trouvée très bonne et sur laquelle je n’ai rien à redire En revanche sur l’avortement, si je ne puis qu’être d’accord sur le fait qu’il faut encourager l’accès à toutes les possibilités contraceptives, j’ai deux remarques à formuler :

        d’une part, dire qu’il ne faut surtout pas oublier les hommes dans les cas d’avortement me semble au minimum très sujet à caution http://lesquestionscomposent.fr/non-les-hommes-navortent-pas/

        d’autre part il est toujours compliqué de généraliser, mais maintenir que l’avortement est forcément et nécessairement une déchirure, outre l’indéniable et importante dimension performative, culpabilisante ; est quelque chose de faux : des femmes avortent, et vont très bien, même le soir seules dans leur lit. http://www.rue89.com/rue69/2011/04/25/un-blog-pour-celles-qui-ont-avorte-et-vont-bien-merci-200976 http://blog.jevaisbienmerci.net/ Sortir de ce paradigme culpabilisant mérite qu’on y réfléchisse un peu à mon sens.

        Merci encore pour votre discours et bon courage pour les combats à venir Salut et fraternité.

        • Je suis ravie que vous n’ayez rien à redire sur mon intervention, parce que si cela n’avait pas été le cas »¦ ;-)

          je suis désolée car je suis sans doute vieille France et je pense qu’un fœtus dans un couple se fait à deux, la question n’est pas là -m^me pour une femme seule et que l’homme doit être associé à cette décision , ne serait-ce pour pas qu’il croit qu’il n’y est pour rien... J’avoue que votre lien ne m’a pas éclairé sur ce sujet... Mon féminisme est d’abord celui de la coresponsabilité dans la contraception, dans la sexualité, dans la décision d’engendrer, dans les décisions éducatives et qu’une femme ne doit jamais oublier de rappeler à un mec qu’il est aussi responsable qu’elle...

          Décider seule d’avorter me paraît donc être une erreur de gestion de la sexualité, de la contraception et de l’engendrement... mais bon pour autant je suis pour la liberté de chacune et non de chacun-chacune de choisir comme elle l’entend sa gestion de l’avortement si elle désire avorter.Et je serais contre tout tutelle d’un mec sur une femme dans ce cas...

          Je ne généralise pas quand je dis qu’avorter n’est pas neutre... mais ma vieille expérience de confidente, c’est fou comme les autres aiment à me confier leur problèmes alors que je trouve rarement des personnes pour écouter les miens »¦ (sauf dans mon équipe que je remercie pour cela :-)), ma vieille expérience m’a toutefois appris qu’une femme qui avait avorté, même si elle disait ne pas le regretter arrivait toujours à me le confier, alors qu’elle ne me confie jaamsi son mode «  classique  » de contraception. Mon amie russe réfugiée politique m’a aussi dit qu’en russie c’était le moyen le plus simple de réguler les naissances »¦

          Je ne vois pas en quoi dire une réalité est culpabilisant... puisque justement ce qui est fautif n’est pas l’avortement mais les circonstances de fait qui l’ont conduit à avorter et donc à porter ce poids, cette responsabilité... Je trouve scandaleux que des parents empêchent l’accès à la contraception, que des fausses évidences soient encore colportées parce qu’il n’y a pas d’éducation sexuelle dés la sixième... et donc qu’aujourd’hui les femmes doivent supporter encore une fois seule cette décision ce parcours du combattant. Ne pas le dire c’est banalisé le poids millénaire de «  cette historie de femme  » alors qu’aujourd’hui ce poids devrait être partagé par les géniteurs et par la société..

          Ma petite belle-soeur me reprochait déjà ma position il y a 35 ans ...mais je l’assume d’autant que ce que je pense ne m’empêche pas de vouloir que l’avortement soit le plus simple d’accès possible aux mineurs aux femmes musulmanes et que les centres d’IVG soient à proximité des centres de vie, anonyme et chaleureux...

          Donc j’ai réfléchi car j’espère ne pas écrire, et surtout ne pas parler sans l’avoir fait... surtout sur un tel sujet, ravivé par le mariage pour tous »¦ mais ma réflexion n’est pas la vôtre... elle est autre.... cela ne nous empêche pas d’être d’accord sur la nécessité de rendre plus simple et plus proche (dans le temps et dans l’espace, l’avortement...

          écologiquement vôtre...