2e lecture

Les modes de scrutin, du département à l’intercommunalité

Manuel Valls deal avec la droite

jeudi 21 mars 2013, par Hélène Lipietz, Aurélien Vernet

Cette deuxième lecture fut l’occasion, comme en première lecture, de rappeler l’attachement profond des écologistes au scrutin de liste proportionnel, nous en avons proposé plusieurs variantes, notamment celle promise par François Hollande pour les députés, engagement n °48 (une dose de proportionnelle), reprise dans le rapport Jospin sur la moralisation de la vie publique.

vous trouverez les vidéos en fin d’article

Voir en ligne : Dossier Législatif

Le principe du binôme paritaire fut rapidement rejeté comme en première lecture, le Sénat n’a pas versé cette fois dans la misogynie qui lui avait valu des articles peu élogieux dans la presse nationale, vous pouvez revoir les vidéos de cette passe d’arme mémorable à la fin de cet article.

Manuel Valls s’est démené pour faire adopter son texte par le Sénat malgré une perte de substance certaine une fois le principe du binôme rejeté. Pour cela il a fait des appels du pied à la droite en promettant notamment

 Le maintien du seuil de 1000 habitants pour les élections au scrutin de liste sans panachage dans les petites communes (les écolos et l’ADCF souhaitait un seuil de 500 comme adopté par l’assemblée nationale).

 Le maintien du seuil de 12,5 % pour participer au second tour d’une élection départementale, ce qui permet de limiter les triangulaires défavorables à la droite.

 L’écart maximum à la moyenne de population entre les cantons d’un même département qui serait poussé à 30 % au lieu des 20 % initiaux. Cette mesure pourrait d’ailleurs être sujette à censure de la part du Conseil Constitutionnel qui prône un respect, le plus strict possible, de la représentativité et de la pondération des voix. Nous devons tendre vers l’idéal de 1 homme = 1 voix dans l’ensemble de nos modes de scrutins. Aujourd’hui dans certains départements le rapport est de 1 pour 47 ! Ce qui veut dire que certains conseillers généraux représentent 47 fois plus d’habitants que d’autres.

Décision du Conseil Constitutionnel : n ° 2010-618 DC à propos de la loi instituant le conseiller territorial.

Dans cette comparaison des écarts de population, le Conseil Constitutionnel a constaté que six départements présentaient des écarts de plus de 20 % à la moyenne régionale quant à leur nombre de conseillers territoriaux rapportés à la population du département : en région Lorraine, la Meuse ; en région Auvergne, le Cantal ; en région Languedoc-Roussillon, l’Aude ; en région Midi-Pyrénées, la Haute-Garonne ; en région Pays de la Loire, la Mayenne ; en région Rhône-Alpes, la Savoie.

Aucun impératif d’intérêt général ne venait justifier ces écarts très importants de représentation. Par conséquent, appliquant sa jurisprudence constante, le Conseil a jugé que la fixation du nombre de conseillers territoriaux dans ces départements méconnaissait le principe d’égalité devant le suffrage. Par voie de conséquence, le Conseil Constitutionnel a censuré l’article 6 et le tableau annexé à la loi qui constituaient des dispositions inséparables.

Sur la trentaine d’amendements que nous avons déposés, un seul fut adopté, il nous avait été proposé par l’un de nos militants du Nord, Alain Vantroys, qui a débusqué une référence à un article abrogé dans la loi, ce que ni le cabinet ni les parlementaires n’avait détecté en première lecture.

Nous avions également un amendement similaire avec Gérard Longuet, amendement proposé par l’ADCF, dont la rédaction technique était meilleure que la mienne, j’ai donc retiré le mien au profit de celui de l’UMP.

Concernant le projet de loi organique, nous avions un amendement visant à mettre à jour la possibilité de voter aux élections locales aux SDF ressortissants de l’Union européenne. La plupart des sénateurs et le rapporteur savaient pertinemment qu’il s’agissait d’un amendement de bon sens au regard du droit européen et de l’égalité de traitement entre les ressortissants français et européens. Malheureusement Manuel Valls s’y est opposé d’une manière odieuse :

« On voit bien quelles sont les populations concernées. Je considère que, même si la loi organique doit évidemment intégrer ce type de proposition, il est difficile d’accepter cet amendement aujourd’hui, compte tenu des difficultés que nous rencontrons avec certaines de ces populations. »

Voici l’extrait du compte-rendu intégral :

M. le président. L’amendement n ° 5 rectifié, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

 »¦ ° Au deuxième alinéa de l’article L.O. 227-3, la référence : « n ° 98-404 du 25 mai 1998 » est remplacée par la référence : « n ° »¦ du »¦ relative à l’élection des conseillers municipaux, des conseillers communautaires et des conseillers départementaux »

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Cet amendement a été un peu difficile à rédiger et je remercie toutes celles et tous ceux qui m’ont apporté leur concours : fonctionnaires de la commission des lois, attachés parlementaires de M. le ministre et d’autres encore que je salue dans nos tribunes. Il vise à permettre aux sans domicile fixe européens de voter aux élections municipales.

En l’état actuel du droit, ces personnes ont le droit de voter aux élections européennes, mais le fait que la loi organique du 25 mai 1998 soit antérieure à l’homologation de la résidence de rattachement les empêche de voter aux élections municipales. Il importe que la France se mette en conformité avec les traités européens en permettant à ces personnes de voter aux prochaines élections municipales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Delebarre, rapporteur. Comme à son habitude, Mme Lipietz a plongé la commission des lois dans une réflexion abyssale »¦ (Sourires.) Sortant finalement de ces profondeurs, la commission a reconnu qu’elle ne pouvait pas traiter ce problème au fond sans connaître l’avis du Gouvernement ! (Nouveaux sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre. Il est vrai qu’il s’agit d’une question difficile. L’amendement de Mme Lipietz vise à permettre aux ressortissants communautaires inscrits dans un centre communal d’action sociale de voter aux élections municipales.

Il s’agit, en s’inspirant de certaines évolutions, de modifier le code électoral pour actualiser le compteur qui a figé le droit applicable aux ressortissants communautaires dans son état du mois de mai 1998. En effet, cette situation n’a pas permis l’application des nouvelles dispositions donnant aux personnes sans domicile fixe domiciliées dans un CCAS la possibilité de s’inscrire sur les listes électorales de la commune dans laquelle ce centre est établi.

On voit bien quelles sont les populations concernées. Je considère que, même si la loi organique doit évidemment intégrer ce type de propositions, il est difficile d’accepter cet amendement aujourd’hui, compte tenu des difficultés que nous rencontrons avec certaines de ces populations.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n ° 5 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.

(L’article 1er est adopté.)

Discussion générale 2e lecture Modes de scrutin
Adoption d’un amendement Lipietz
Amendement Lipietz SDF communautaires
Mise en conformité avec le droit européen et refus révoltant du ministre de l’intérieur

Forum

1 Message

  • Un ministre de l’intérieur qui ose violer la législation européenne en tenant des discours dignes de l’extrême droite.

    Un premier ministre qui, je le crains, ne violera pas les injonctions de la commission européeenne qui tient un discours de droite que même le FMI ne tient plus.

    Et c’est ainsi que Hollande veut faire revenir les abstentionistes de gauche ?